vendredi 9 mai 2014

Non je ne suis pas folle




Je suis allée voir mon psychiatre aujourd'hui. Cela faisait bien 6 mois qu'on ne s'était pas vu, il m'avait un peu manqué, et pour le coup, j'en avais des choses à lui raconter.

J'aime bien mon psy, parce qu'il est plutôt compréhensif, il m'aide à y voir plus clair. Et il sait rire quand il faut, il est très humain. Je n'oublie pas à quel point il m'a sauvé la vie quand j'étais plus bas que terre.

Il m'a dit qu'il m'avait trouvé beaucoup plus posé, que je parlais avec une aisance nouvelle. Et avec beaucoup de conviction, il m'a assuré que j'allais mieux et que je pourrais réduire le traitement si les choses continuent à aller en ce sens. Il dit qu'il faut laisser le temps à la vie de consolider les choses. Ne pas brusquer les événements.

Avant chaque rendez-vous, je réfléchis à ce que je vais lui dire, l'angle d'attaque des sujets que je vais aborder. J'ai peur de dire un mot à la place d'un autre ou qu'il ne me comprenne pas. Il reste très silencieux parfois, se contentant d'acquiescer au rythme de mes phrases. Il ponctue la discussion de questions, pas aussi simples qu'il n'y paraît.

Tous les jalons que je pose font ma stabilité, c'est ce qu'il m'a assuré. Autant de sécurité autour de moi pour prévenir une possible rechute. Mais je sais que je ne suis plus seule face à la maladie, j'ai ma famille, mon copain, et j'aborde les choses avec beaucoup plus de détachement qu'auparavant.

Au début, j'avais du mal à accepter la maladie, devoir prendre des comprimés tous les jours n'égaye pas vraiment la journée. Et puis c'est devenu une habitude, une routine, je sais que ça me maintient dans une attitude positive, que je ne suis pas sur le fil, que je ne risque rien. J'accepte ma maladie, qui n'en est pas vraiment une au final, et comprend bien toutes les précautions à prendre pour ne pas retourner à l'hôpital.

Je sais que j'ai des gens derrière moi, des gens qui me soutiennent, qui ne comprennent pas forcément la bipolarité mais qui sont là quoi qu'il arrive. Et ça me fait énormément de bien de le savoir.

Les gens ont tendance à considérer d'un regard nouveau les gens qui ont fait un séjour à l'hôpital psychiatrique. Est-ce que la personne en face de moi est folle ? C'est tout de suite la question qui s'impose dans les esprits. Un séjour en hôpital permet de se remettre les idées en place, de se reposer, on s'occupe de vous. Et c'est agréable d'être cajolé quand plus rien n'allait. Dans mon hôpital, j'avais la chance d'avoir accès à une salle de sport et à des activités artistiques comme de la peinture ou des instruments de musique. Cet hôpital ressemblait à un complexe de vacances, sauf que les bâtiments étaient divisés en unités. Allant de la plus grave à la moins grave. Parfois des appels sur les talkie walkie indiquaient qu'il fallait des renforts dans une unité, et ça me faisait un peu peur. Mais j'ai été bien traité et j'ai noué des amitiés, certes éphémères, mais bien réconfortantes sur le moment.

La chose qui m'a frappé dans mon unité c'est que tout se monnayait, s'échangeait, des clopes contre des livres, des disques, de la nourriture. C'était toute une petite société qui se recréait. Et on pouvait voir que moins on avait de choses et plus on était seul.

J'avais la chance d'avoir des visites, ma mère uniquement. C'était réconfortant d'avoir un soutien extérieur en plus du personnel présent sur place. Elle venait toutes les semaines et m'amenait parfois des magazines. C'est à ce moment de ma vie que je me suis le plus sentie être sa fille. On ne parlait pas forcément longtemps, on lisait, on dessinait aussi parfois et je me souviens d'un jour où elle m'a fait toute jolie en me laquant les ongles et en me faisant une jolie tresse.

Ce qu'il faut savoir, c'est qu'on peut être admis dans un hôpital psychiatrique pour plein de raisons différentes. De la dépression en passant par la tentative de suicide, on peut aussi y croiser des schizophrènes mais ça reste relativement rare dans celui où je suis allée.

J'y suis allée deux fois. La première fois pour un burn out juste après le bac, trop de pression et la seconde fois pour une déprime sévère après une rupture. J'étais tellement dévastée que je ne mangeais plus, faisait mine d'oublier, et j'ai perdu 20 kilos en un mois. J'ai fait peur à ma famille quand ils m'ont retrouvé.


Il ne faut pas négliger les gens autour de nous qui vont mal, on pense qu'ils sont juste tristes et ils font une déprime bien sévère. Parfois c'est dur d'accepter qu'on a besoin de se faire aider, qu'on a besoin d'être écouté ou qu'on nous tende la main. Mais une fois la décision prise et l'acceptation du mal-être ça va déjà mieux. Ne négligez pas les gens qui ont le courage de vous dire qu'ils vont mal, aidez-les, accordez leur un peu de temps, je vous assure que ça les aidera déjà beaucoup.

7 commentaires:

  1. En effet, psychiatrie rime souvent avec "folie", c'est pour ça que tant de personnes le cache. Si tu veux mon avis, c'est à cause des films ; )

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  2. Merci pour ton témoignage, si sincère & touchant... & bravo aussi, pour avoir le courage de te confier sur ce sujet. Tu as raison, il ne faut pas négliger les gens qui vont mal.

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  3. Il est touchant cet article ;) Bises

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  4. Bel article émouvant.

    lacouleurducoquelicot.blogspot.fr

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  5. J'aime beaucoup ton blog, malgré les epreuves de la vie il faut savoir rester forte ! Courage ♥

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  6. Olala tu peux pas savoir à quel point ton article me touche !!!
    J'ai une personne très cher dans mon cœur qui est bipolaire et en phase d'acceptation on va dire. J'essaye de la soutenir malgré son rejet ( dû à ses phases dépressives) et je sais que la route est encore longue jusqu'à la stabilisation :(
    En tout cas je te souhaite bon courage, et comme m'a dis mon psychothérapeute quand la volonté de s'en sortir est là il y a 80% de chance de réussir et de vivre "bien" avec cette maladie ! Donc ne perds pas espoir ;)

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  7. Bel article ! C'est même plutôt honnête & courageux de ta part d'en parler ! & on sent que tu as envie d'avancer, d'aller mieux. C'est beau & je te le souhaite sincèrement :)

    Pour une autre raison, je suis aussi passée par la case hôpital pendant quelques semaines. Mais on ne m'a pas chouchoutée, moi. On m'a fait comprendre que j'étais trop bête & que je devais laisser la place aux "vrais" malades. Parce qu'une ts à 15 ans, c'était juste une connerie d'ado' pour certains, une envie de se faire remarquer. Toute façon je n'ai jamais eu de chance avec le personnel hospitalier moi, on s'y fait au bout d'un moment ;)

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